lundi 14 novembre 2011

La traversée.

Droit comme un miracle, il se tenait sur le plus haut mât entre la mer démontée et le ciel versant des murs d'eau, criant au capitaine qu'il voyait l'horizon. Il ne voyait rien; excepté les vagues immenses qui semblaient des montagnes. Le capitaine n'entendait rien, la nuque brisée sur le pont. Et l'autre debout hurlant horizon en vue, je vois comme je vous vois son oeil de feu, capitaine! Il ne voyait rien; il essayait de respirer un peu d'air, dans toute cette eau. Il pensait au rivage, comme il serait sec sur le rivage. Il se rappela qu'une fois, il n'avait pas but pendant trois jours, tant son rivage était sec, avant d'en douter, devant tant d'eau. Capitaine, je me disais qu'on sera bien content de retrouver nos amours et nos copains, dans quelques jours. Comme je vous le dis que ça sera. Il n'était pas sûr d'avoir bien dis ce qu'il avait dit, car il ne s'entendait même plus crier. Quelques instants plus tard cependant, il perçut quelque chose de distinct, comme un craquement de l'embarcation, qui se répercuta dans tout son corps. Il se rassura rapidement lorsqu'il sentit une main le saisir par la gorge pour le faire basculer par dessus bord. L'embarcation n'avait rien. Tu vas la fermer, ta gueule et laisser les morts dormir tranquille, putain de putain. Il voulut répondre qu'on le lacha parce qu'il voulait vomir. Tu vas la fermer, ta gueule et laisser l'espoir de côté, il n'y a aucune issue qui te sera favorable. Plus jamais.

Sa voix ultime pourtant étranglée fît trembler la vague qui l'engloutit, de ces deux syllabes titanesques :
Mensonge!

Aucun commentaire: